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Cigarettes: guerre de prix dans la réserve - La Presse

Yrys

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Cigarettes: guerre de prix dans la réserve

Une guerre de prix opposant les vendeurs de tabac de la réserve de Kahnawake provoque depuis quelque temps une chute vertigineuse du coût des cigarettes de contrebande.
Pour 6 $, les fumeurs peuvent s’y procurer 200 cigarettes, l’équivalent d’une cartouche normalement vendue 65 $.

Résultat : la contrebande de cigarettes prend des proportions endémiques, selon l’Association canadienne des dépanneurs en alimentation (ACDA). «C’est évident qu’on
ne peut concurrencer (les vendeurs de cigarettes autochtones), affirme le vice-président de l’ACDA, Michel Gadbois. Sans les taxes, ils sauvent 80 % du prix.» «On avait
déjà vu des cartouches de cigarettes à 8 $ ou 10 $, mais 6 $, c’est du jamais vu. Ça témoigne clairement d’une guerre de prix qui fait rage», explique de son côté
François Damphousse, porte-parole de l’Association pour les droits des non-fumeurs.

À une vingtaine de minutes du centre-ville de Montréal, dans la réserve de Kahnawake, on peut facilement mettre la main sur des sacs contenant 200 cigarettes pour 6 $
et 7 $. Certains vendeurs affichaient même le prix des cartouches à 5 $, il y a tout juste quelques jours. Et les fumeurs, nombreux à y faire leurs provisions lors du
passage de La Presse, hier, ont l’embarras du choix. Plus d’une dizaine de points de vente aménagés dans des cabanes sont alignés côte à côte sur le chemin
Saint-Isidore, près de la route 132. Chez A & B, on vous tend un briquet en même temps que vos 200 cigarettes canadiennes à 7 $. Chez MC Smoke’s, les drapeaux
canadien, américain et aussi celui du CH flottent au vent devant la petite remise. Là aussi le panneau extérieur affiche 7 $. De l’autre côté de la 132, quelques cabanes
annoncent leurs cigarettes à 6 $.

Dans l’une d’elles, un vendeur explique que la concurrence, féroce, rend les affaires difficiles à cause des prix dérisoires. «Nous sommes pris à la gorge. Les sacs de 200
cigarettes coûtaient au moins 10 $ il y a six ou sept mois», souligne le commerçant. Sur son comptoir, une affiche exhorte les clients à arrêter d’exiger des prix de plus
en plus bas. Au fond du local, sont empilées des dizaines de boîtes remplies de cigarettes. «Chaque boîte contient 50 cartouches de cigarettes. Je les vends 300$, mais
certains les écoulent pour 250 $ et moins. Qu’est-ce que ça sera plus tard ?» peste le vendeur. À un autre point de vente, une employée souligne que les clients se
plaignent constamment et exigent des prix toujours plus bas. «Des fois, c’est du harcèlement ; il faut que je barre la porte ! Personne ne ferait ça chez Couche-Tard !»
lance Mel.

Ses clients sont pour la plupart des habitués de l’endroit. «Ils achètent plusieurs sacs à la fois ou des boîtes. Certains viennent d’aussi loin que le Nouveau-
Brunswick», explique la jeune femme de 22 ans. En un an, elle a vu les prix de la cartouche passer de 22 à 6 $. «Au début, je faisais plus de 1000 $ par quart de
travail, contre 300 $ aujourd’hui», résume Mel. Garée devant un kiosque voisin, Doris, une Montréalaise, raconte venir une fois par mois faire le plein de tabac. «Je me
sens un peu illégale, mais ça coûte plus cher un paquet en ville qu’un carton ici», justifie-t-elle, un air coupable.

Le prix normal qui devrait être payé pour une cartouche vendue sur une réserve autochtone, en incluant les taxes fédérales, est de 33 $, estime Robert Cunningham,
analyste principal des politiques à la Société canadienne du cancer. Selon la Gazette officielle du Canada en 2005, le coût de production d’une cartouche de 200 cigarettes
pour un manufacturier, en incluant l’emballage, est de 5,70 $.

C’est mes parents qui payent

Vers midi hier, des grappes d’adolescents grillaient des cigarettes sur le trottoir autour de l’école secondaire Pierre-Dupuy, dans le quartier Centre-Sud. Comme «presque
toute l’école», Catherine et ses amies fument des «indiennes». «Mes parents vont les acheter à Kahnawake. On va toujours au même kiosque», souligne l’adolescente de
15 ans. Tout près, Sophie Verville fait aussi des ronds de fumée avec un produit de contrebande. «C’est facile d’en acheter avec le bouche à oreille», explique la jeune
femme de 18 ans. Un autre adolescent explique la facilité désarmante avec laquelle on peut acheter 200 cigarettes autour de l’école en déboursant entre 10 et 20 $. « Va
voir un pusher dans le stationnement du McDo et demande-lui », suggère l’élève vêtu d’un polo aux couleurs de son école.

À l’angle Ontario et Papineau, devant le McDo en question, le premier fumeur croisé accepte aussitôt de vendre une cartouche de cigarettes pour 15 $. « C’est un de mes
amis qui me fournit », explique l’homme édenté en camisole, qui court chercher le sac de tabac chez lui rue Champlain. Le vendeur itinérant nous offre aussi d’échanger
nos numéros de téléphone, pour de futures transactions.

Acheter une cartouche de cigarettes sous le manteau est aussi un jeu d’enfant au parc Émilie-Gamelin, qui jouxte le métro Berri-UQAM. En moins de cinq minutes, un
homme part et revient avec une cartouche à 20 $. Même manège devant La Maison du père, une ressource pour sans-abri située boulevard René-Lévesque. Le temps de
crier « contrebande », un homme prénommé Denis extirpe huit sachets de 25 cigarettes d’un vieux sac. Prix : 20$. «Je suis toujours ici», souligne le vendeur, heureux
d’avoir un nouveau client.


 
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